Le fondateur de Facebook prédisait la fin de l’ère de la vie privée … .Ce qui est certain, c’est que sms et téléphones mobiles, internet et courriels ont brouillé les repères spatio-temporels traditionnels. En conséquence, la Cour européenne des droits de l'homme considère que l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme relatif à la vie privée de s'applique à l'entreprise et l’arrêt Nikon reconnaît que« le salarié a droit même au temps et au lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée ».
Mais comment concilier lien de subordination et intimité du salarié ?
L’utilisation de l’outil informatique à des fins privées doit être raisonnable
Alors même que les connexions internet établies par le salarié pendant son temps de travail sont présumées professionnelles (Cass. soc. 9/7/2008 n° 06-45.800), prenant en considération les recommandations de
En visant un « usage raisonnable », le juge applique les principes généraux de la responsabilité civile, notamment la théorie de l'abus de droit. En conséquence, la Cour de cassation considère « (…) que la seule conservation sur son poste informatique de trois fichiers contenant des photos à caractère pornographique sans caractère délictueux ne constituait pas, en l'absence de constatation d'un usage abusif affectant son travail, un manquement du salarié aux obligations résultant de son contrat susceptible de justifier son licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé » (Cass. soc., 8 déc. 2009, n° 08-42.097, F-D, G. c/ SA Peugeot Citroën automobiles)
Comment est apprécié l’abus de droit
Une faute ne peut donc être retenue à l'encontre du salarié qu'en cas d'abus (Cass. soc. 18 juin 2003 n° 1658 F-D : RJS 8-9/03 n° 979), l'article L. 1121-1 du Code du travail disposant que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché »
L’usage abusif est caractérisé soit par la durée des connexions, soit par les conséquences préjudiciables pouvant en résulter ou par leur caractère délictuel
D’une part, le licenciement d’un salarié est fondé lorsque « que la réception suivie d'un stockage dans l'espace mis à la disposition du salarié par l'employeur (…) caractérisent, compte tenu de leur durée et de leur importance, des agissements fautifs » (CA Besançon 21 septembre 2004 n° 03-1807, ch. soc., SNC General Electric Energy France c/ Girardot.), lorsque les factures produites font apparaître un usage particulièrement important ), en l’état du « nombre conséquent de ces fichiers et le temps dès lors consacré » (Cass. soc. 16 mai 2007 n° 1021 F-D, Eve c/ Sté Info Mag) ou si « le salarié avait usé de la connexion internet de l'entreprise, à des fins non professionnelles, pour une durée totale d'environ quarante et une heures durant le mois de décembre » (Cass. soc. 18 mars 2009 n° 07-44.247 (n° 525 F-D), Pinot c/ Sté Lauzin)
Par contre Le Juge écarte la faute dès lors qu’il constate des connexions d’une minute au plus (CA Paris 24 mai 2005 n° 03-01078, 22e ch., Launay c/ SA Compagnie française d'impression), des connexions ponctuelles, tôt le matin ou à la pause déjeuner (CA Paris 24 janvier 2007 n° 05-5297, 22e ch. soc. A, Loget c/ Me Cognet ès qual.), La simple présence d'un nombre limité d'images pornographiques et zoophiles dans le disque dur du salarié et l’absence de preuve de connexion à des sites pornographiques excluent une « utilisation habituelle du matériel informatique à un usage autre que l'accomplissement des tâches qui lui étaient confiées » (CA Paris, 13 mai 2008, RG n° 06/11072 : JurisData n° 2008-001509).
D’autre part, les « (…) risques de virus informatiques, avec des conséquences pouvant être extrêmement préjudiciables », (CA Dijon 13 avril 2006 n° 05-653, ch. soc., Pignon c/ SA Imprimerie Perroux), les « (…)risques de virus mais aussi d'insérer sur son ordinateur des images inconvenantes » (CA Douai 31 janvier 2007 n° 06-530, ch. soc., X c/ Y) ou le fait que l’entreprise puisse « (…)apparaître comme un client intensif de sites pornographiques (…) » (CA Grenoble 10 novembre 2003 n° 00-4741, Richard c/ SA Schneider Electric) causent un préjudice justifiant le licenciement
Enfin, à l’inverse de la connexion à des sites zoophiles qui n’est pas pénalement répréhensible (Cass. soc., 8 déc. 2009, n° 08-42.097, F-D, G. c/ SA Peugeot Citroën automobiles), la visite régulière à des sites pédophiles de «nature à constituer le cas échéant l'infraction de l'article L 227-23 du Code pénal, infraction dont l'employeur pourrait être pénalement responsable » (CA Aix en Provence 17 décembre 2002, Fiker c/ Sté française des ascenseurs Koné) est constitutive d’une faute grave.
De même, le délit d’abus de confiance constitué par le détournement de l’ordinateur et de la connexion internet par le salarié pour visiter régulièrement des sites à caractère pornographique emporte les effets d’une faute lourde (Cass. crim. 19 mai 2004 n° 3176 F-PF, Lievens)
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