Cass. Soc. 5 mars 2008 n° 07-11.123 Fédération Syndicale des Activités postales et de télécomunications c/ Sté France Télécom
La société FRANCE TELECOM mute d'office un salarié fonctionnaire, délégué du personnel et membre du CHSCT, au motif de l'intérêt du service.
Il est jugé de longue date qu'aucune modification du contrat de travail, ni même des conditions de travail, peut être imposé à un salarié protégé (Soc. 30/6/93 n° 89-45.479 ; Soc. 21/11/06 n° 04-47.068). Une modification imposée à un représentant du personnel
- ouvre droit à des dommages-intérêts (Cass. soc. 24/4/03 n° 01-46.969 (n° 1113) et 02-41.308 (n° 1118)
- fonde la demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail (Cass. soc. 15/2/06 n° 03-42.510)
- rend l'employeur coupable d'un délit d'entrave, sauf s'il apporte la pleine justification de la mesure (Crim. 22/11/05 n° 04-87.021 ; Crim 12/12/06 n° 05-86.601).
Par son arrêt du 5 mars 2008, la Cour de cassation rappelle d’une part qu’aucun changement des conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé. D’autre part, la Cour de cassation retient que la mutation d’office ayant pour effet de mettre fin aux mandats de délégué du personnel et membre du CHSCT, elle constitue un trouble manifestement illicite que le juge des référés doit faire cesser :
« Vu les articles 809 du code de procédure civile et L. 423-16 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé, que M. X..., fonctionnaire placé sous l'autorité de la société France Télécom a été élu délégué du personnel et membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail de l'"Agence de distribution", établissement secondaire de la direction régionale de Bourgogne de cette société, où il était affecté ; qu'à la suite de la suppression de son poste, la direction lui a notifié le 16 juin 2006 une mutation d'office dans un autre établissement secondaire ; que la Fédération syndicale des activités postales et des télécommunications (FSAPT) et le syndicat Sud Bourgogne (les syndicats) ont saisi le président du tribunal de grande instance afin qu'il soit constaté que cette mutation contrevenait aux dispositions des articles L. 423-16 et R. 236-7 du code du travail et qu'il soit en conséquence interdit à la société France télécom de mettre fin à ces mandats ; que M. X... a saisi la juridiction administrative d'un recours en annulation de cette mutation ;
Attendu que pour rejeter la demande des syndicats, la cour d'appel retient que la question posée conduit nécessairement à mettre en cause la validité de la mutation dont la régularité a été soumise à l'examen de la juridiction administrative puisque le salarié est fonctionnaire ; qu'il n'est pas possible de dissocier la validité de la décision de mutation de ses effets puisqu'un salarié ne peut être délégué du personnel ou membre du CHSCT que de l'établissement dans lequel il travaille effectivement, qu'au surplus l'article L. 423-16 du code du travail, dont la violation est invoquée, prévoit que les fonctions de délégué du personnel prennent fin notamment par la perte des conditions requises pour l'éligibilité et que la question se pose de savoir si une mutation dans l'intérêt du service ne correspond pas à cette situation ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'aucun changement de ses conditions de travail ne pouvait être imposé à M. X... en sa qualité de représentant du personnel, sans son accord, et que la décision de mutation d'office, qui a eu pour effet de mettre fin immédiatement à ses mandats, constituait un trouble manifestement illicite auquel il appartenait au juge des référés judiciaires de mettre fin, nonobstant la contestation de la régularité de la mutation que celui-ci en sa qualité de fonctionnaire avait engagée devant le juge administratif, la cour d'appel a violé les textes susvisés »
Commentaires